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jeudi 27 mars 2014

Le sous-préfet enquête…



Durant les dernières années du 1er Empire, en dehors des agitations politiques, au cours desquelles les Aubiérois avaient une réputation bien établie, il apparaît que toutes les nuits d’Aubière n’étaient pas toujours sereines. L’ordre public était parfois troublé, malgré les appels au calme réitérés par le maire à force d’arrêtés municipaux.

C’est ainsi que dans les nuits du 8 au 9 et du 11 au 12 mai 1811, on s’en prend à la vigne du maire et à un mur de clôture de Mr de Provenchères, gendre de feu le dernier seigneur d’Aubière…





Sur ordre du préfet du Puy-de-Dôme, et escorté de deux brigades de gendarmes, le sous-préfet, lui-même, se transporte à Aubière pour enquêter sur ces deux délits.



Les faits : d’une part, on a coupé douze cent ceps, ou environ, dans la vigne de Me Girard, Maire de la Commune d’Aubière, d’autre part, un mur de clôture, avec le portail, appartenant à Mr de Provenchères, propriétaire, a été renversé.



Enquête

Le sous-préfet se présente à la mairie où le maire Guillaume Girard, son adjoint Claude Planche, et tout le conseil est réuni. On reconnaît Antoine Cassière, François Fouilloux, Martin Moins, François Aubény, Jean Cougout, Amable Bourcheix, François Noellet, et Antoine Noellet.

Interrogé, « le Sieur Claude Planche, adjoint à la Mairie, nous a déclaré que les nommés Bertrand Pezant, âgé de 18 ans [1], Amable Jallut, même âge, Guillaume Roche, âgé de 24 ans, Antoine Beneix, âgé aussi de 24 ans [2], et Joseph Montagnon, conscrit de 1811 [3], dont le numéro n’a point encore été appelé, étaient soupçonnés d’être les principaux auteurs des délits commis chez Mr le Maire et chez Mr de Provenchères, et que les individus pouvaient être regardés comme les plus mauvais sujets de la Commune. »

Martin Moins, membre du Conseil, assure le sous-préfet que le nommé Guillaume Lonchambon, conscrit déserteur, lui avait dit que Roche et Beneix, dénommés ci-dessus étaient les auteurs des délits.

Hormis Antoine Cassière, qui ne peut infirmer ni confirmer ces affirmations, les autres membres du conseil approuvent la déclaration de l’adjoint Planche. Ils ajoutent que

1° Bertrand Pezant avait sa mère et sa sœur détenues en prison comme convaincues de vol ;

2° qu’Amable Jallut appartenait à la famille appelée "Pifra" [4], dont 5 individus étaient aux galères ;

3° que Guillaume Roche avait eu son père tué dans une cave en y volant du vin ;

4° que le père d’Antoine Beneix était mort aux galères ;

5° enfin que Joseph Montagnon était nommé comme voleur de profession.



Témoignage de Gabriel Valeix :

« dans la même nuit du 11 au 12, sur les deux heures du matin, étant couché dans son lit, il fut réveillé par des coups de pierre qui portèrent sur sa porte, qu’il se leva de suite et qu’étant accouru à l’endroit où on les dirigeaient, il avait reconnu et distingué les nommés Joseph Beneix, dit "Pacha", et Bertrand Pezant, accompagnés de six autres qu’il n’avait pu distinguer, qu’il avait de plus entendu le bruit occasionné par la chûte de deux pièces de bois adossées à sa maison et renversées dans le chemin par les dits Beneix et Pezant ; que voulant aller à leur poursuite il fut assailli au même moment à grands coups de pierres ; qu’il avait vu fuir une de ses pièces de bois par le dit Beneix et que l’autre le fâchait de ce qu’on ne la sciait pas à l’endroit qu’il avait marqué. C’est tout ce qu’il a dit savoir. »



François Fallateuf, tambour de la Commune, a déclaré : « avoir entendu du bruit dans la nuit du 11 au 12, que ceux qui le faisaient chantaient et jetaient des pierres çà et là, mais que les ténèbres ne lui ont pas permis de distinguer personne. »



Les cinq individus, excepté Guillaume Roche qu’on n’a pu trouver, présumés être les auteurs des délits, ont été aussitôt arrêtés par mesure de sécurité et de police, pour être conduits de suite par les gendarmes devant le Magistrat et déposés dans la Maison d’arrêt de Clermont.





Estimation des dégâts :

Le mur de Mr de Provenchères, « à l’aspect de nuit, de la longueur d’entour huit mètres et une hauteur de quatre mètres, dans lequel était un grand portail encadré de pierre de taille, avait été entièrement renversé et les pierres de taille cassées. Nous avons estimé cette réparation, après avoir entendu un homme de l’art, à la somme de quarante francs. »

La vigne de Mr le Maire, « où nous avons remarqué qu’environ 800 seps avaient été coupés. Nous avons estimé la valeur à cent cinquante francs. »



Sources : Archives départementales du Puy-de-Dôme - 2 Z 21.



© - Cercle généalogique et historique d’Aubière



[1] - Bertrand Pezant, né le 3 avril 1793, fils d’Annet, tailleur d’habits, et de Marie Babut. Cette dernière, ainsi que sa fille Marie, sont en prison en 1811, convaincues toutes les deux de vol.
[2] - Antoine Beneix, né le 20 juillet 1788, fils de Joseph et de Gabrielle Coherier. Son père Joseph est « mort aux galères » à Riom, le 10 août 1803.
[3] - Joseph Montagnon, né en 1791, fils de Michel et d’Antoinette Mazen. Tous sont célibataires au moment des faits. Dans les relevés de l’état-civil aubiérois, nous n’avons pu identifier ni Amable Jallut ni Guillaume Roche.
[4]  - Famille Pignol. Amable Pignol, dit Piffrat, marié en 1772 à Gilberte Finayre, et ses fils.



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