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mercredi 5 novembre 2014

Registre d’audience du Bailliage d’Aubière_13



commencé le 6 avril 1767

Cet épais registre, issu des archives communales d’Aubière, rassemble les jugements rendus à Aubière par le bailly Thoury entre 1767 et 1780.

Le bailli était, dans l'Ancien Régime français, le représentant de l'autorité du roi dans le bailliage, chargé de faire appliquer la justice et de contrôler l'administration en son nom. La juridiction en charge d'un bailli s'appelle un bailliage. En France méridionale, le terme généralement utilisé était sénéchal et la circonscription la sénéchaussée.
Mais il s’agit ici du bailliage seigneurial d’Aubière (les baillis royaux ayant perdu leur pouvoir au XVIème siècle).

Le notaire Thoury, bailli seigneurial d’Aubière, était néanmoins conseiller du roi en la ville de Clermont-Ferrand. C’était en quelque sorte un juge de proximité au service du seigneur d’Aubière.

On ne passe plus par le chemin de Ventadour

Retour sur le Ventadour. En ce mois de juillet 1780, plusieurs Aubiérois se sont donnés rendez-vous sur le chemin de Vantadour pour en restreindre la libre circulation voire à créer des situations dangereuses pour les passants. Le procureur d’office et son commissaire de police veillent. Nom d’un troubadour !

Registre d'audience du Bailliage d'Aubière - Extrait
(Archives communales d'Aubière - Cliché Pierre Bourcheix)

Du jeudy 20 juillet 1780

Les personnages
Outre le bailli Thoury, son greffier, Jean Soleil son huissier, le procureur d’office et le commissaire de police, nous avons Louis Tartarat, Ligier et Amable Daumas, Jean et autre Jean Aligros, et enfin, Jean Roche dit Thomas, tous vignerons, sauf les deux Aligros qui sont maçons, et tous habitants du lieu d’Aubière.

Les faits
Tous, sauf Jean Roche, creusent une fosse, en partie sur le côté et en partie sur le chemin de la Croix de Vantadour, pour récupérer pierres et sable. Jean Roche, quant à lui, construit un toit de pierres sur la porte de sa cave (un auvent, sans doute). Tous, ce faisant, réduisent la largeur du chemin et empêche de fait la circulation sur ledit chemin. De plus les fosses pratiquées dans le chemin peuvent engendrer un danger pour les personnes et les bestiaux qui passent à côté.

Les sentences du bailly Thoury

Contre Louis Tartarat
« …ledit Tartarat sera tenu de faire combler dans le jour la fosse qu’il a pratiquée pour tirer de la pierre et sable à cotté et dans le chemain de la Croix de Vantadour, attendu que lad. fosse empêche l’usage libre dudit chemain, est dangereuse pour les passants et au bestiaux… Pour l’entreprise sur le chemain commun l’avons condamné à l’amande de vingt sols. »

Contre Amable et Ligier Daumas
« Nous avons donné acte auxd. Daumas de la déclaration par eux présentement faitte qu’ils avaient délaissé leur vigne sittuée sur le chemain de la Croix de Ventadour auxd. Aligros pour en tirer de la pierre et du sable, et que si lesd. Aligros ont [entrepris ?] de faire des fosses et creusements qui endommagent le chemain, c’est à eux à qui la faute en doit être imputée. En conséquence avons renvoyé lesd. Daumas de la demande contre eux formée par le procureur d’office. »

Contre Jean et autre Jean Aligros
« …et faisant droit sur lad. déclaration [ci-dessus], avons condamné lesd. Aligros solidairement à recombler et remplir dans le jour les fosses et creusements par eux faits et pris en partie dans led. chemain et à cotté d’ycelluy qui forment un précipisse dangereux aux passants et dont la terre empêche l’usage libre dud. chemain. Et pour la contravention les avons condamnés en l’amande de vingt sols. »

Contre Jean Roche, dit Thomas
« Nous avons donné défaut contre led. Roche, faute de comparoir [lire comparaître], et pour le proffit l’avons condamné à retirer et à enlever dans le jour le toit de pierre qu’il a placé au devant de la porte de sa cave dans le chemain de la Croix de Ventadour qui empêche le passage libre dud. chemain et le condamnons à l’amande de trente sols. »


Notes généalogiques [tous les actes ont eu lieu à Aubière, sauf mentions contraires] :
Amable et Ligier Daumas : ils sont frères et fils de Guillaume et de Jacquette Bourcher. Amable est né en 1741, marié en 1ères noces en 1766 avec Louise Jallat, en secondes noces, le 18 janvier 1780 avec Françoise Dégironde. Ligier ou Léger est né en 1749, il est marié depuis le 13 mai 1766 à Clauda Jallat.
Jean et autre Jean Aligros : Pas de trace d’un second Jean Aligros, maçon ou pas, à Aubière à cette époque. Il peut s’agir soit d’un frère au premier Jean soit d’un oncle qui n’a fait que passer à Aubière sans y laisser aucune trace dans les actes (sauf le présent jugement). Le seul Jean Alligros connu est fils de Michel et de Catherine Teteix, arrivés tous les trois de Creuse dans les années 1770. Jean est né vers 1755 à Saint-Avit-le-Pauvre (23), il se mariera en 1782 à Aubière avec Marguerite Lance.
Louis Tartarat : né le 25 avril 1723, il est fils d’Etienne et de Martine Vincent. Il est pour l’heure marié en secondes noces avec Marie Courtadon.
Jean Roche, dit Thomas (sans doute à cause de son grand-père paternel qui portait ce prénom) : né vers 1746, il est fils de Ligier et de Jeanne Gioux. Il est marié depuis le 24 mai 1768 à Jeanne Michelle.


VENTADOUR : le quartier du Ventadour, le chemin de la Croix du Ventadour (ou Vantadour) et la Croix du Ventadour. Voilà plusieurs semaines que je vous parle de l’un ou de l’autre. Mais c’est où ?
Le quartier est dit « hors les murs d’Aubière », donc au-delà des portes des Ramacles ou de la Quaire, ou des quartiers précédemment construits comme les quartiers de la Treille ou du Barri au nord, les quartiers des Planches ou du Massadou au sud.
Autour du chemin, qui traverse sans doute le quartier, ou du moins au-delà de la partie construite, on nous indique qu’il y a des caves et des vignes. Cela se vérifie aussi bien au nord qu’au sud.
On parle aussi d’une croix du Ventadour. Il y a une croix au nord comme au sud !
Alors où ? Au nord ? Au sud ? J’ai ma préférence (d'ailleurs confirmée par des actes notariés du début du XVIIème siècle), mais quel est votre avis ? J’attends vos suggestions.

Et puis, pour finir, ce nom de Ventadour. Nom de lieu nous dit-on, mais pas en Auvergne. Un troubadour a popularisé ce toponyme en se faisant connaître sous le nom de Bernard de Ventadour, village de son Limousin natal. Mais quel rapport avec Aubière ? Aurait-il séduit une Aubiéroise sur les coteaux de la vallée de l’Artière ?...

© - Cercle généalogique et historique d’Aubière – Pierre Bourcheix



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7 commentaires:

  1. Je te signale qu'il existait à Beaumont un quartier du Ventadour, situé à la sortie Ouest du Bourg (ce nom a perduré jusqu'au XIXe siècle). J'ai subodoré (à tort ou à raison) que ce nom lui avait été donné parce qu'il s'agissait d'un lieu exposé aux vents. D'ailleurs:
    -Il existait un quartier contigu appelé Dos Molins (de là à dire qu'il y avait des moulins...je n'ai pas encore osé franchir le pas! Ceci est confirmé par l'appellation "Dau Ventadour sivé dau Molins";
    -De plus, les enclos y étaient entourés de solides murailles, comme pour protéger les cultures de l'effet du vent. ces anclos étaient appelés des "Citas" ex: La cita du sieur Goughon, Notaire à Beaumont (qui commença sa carrière en étant greffier au service de Thoury....)
    La localisation de ce quartier est visible sur mon site (faire jacques pageix sur internet suffit pour y accéder).
    -Il s'agit bien du Ventadour évoqué dans le blog du CGHA et le jugement de Thoury concerne en fait Beaumont, et je me réfère à plusieurs documents d'archives des familles Bouchet -Bernard-Luquet :
    l'un d'eux concerne, du 12 août 1773, est une sentance prononcée par
    « Gérard Arthème Thoury, Conseiller du Roy, Seul et unique (sic) Juge Civil et Criminel de Justice et de Police en la Chatellenie de Beaumont.
    Bien à toi et bravo pour ce site que je consulte souvent et avec plaisir!

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    1. Il y a aussi un "Ventadour" à Beaumont ! Décidément...
      Mais celui dont on parle sur ce blog, ici : http://cghaubiere.blogspot.fr/2014/10/les-maisons-de-nos-ancetres02.html
      est bien situé à Aubière, comme l'indique l'acte de 1603 !
      L'idée du lieu venté proche de moulins est à creuser (pour Aubière).

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  2. Le Goughon en question est celui qui défraya la chronique dans une ténébreuse affaire, comme l'aurait dit Balzac, de vols de dindons, de déplacement de borne, et d'incendie des bâtiments agricoles du Sieur Jean Cézar Champflour d'Allagniat...

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  3. Cher Pierre,
    Décidément, je n'arrive pas à faire tout d'un coup: j'ajoute qu'au carrefour du Ventadour, se dressait la croix de Saint-Verny, qui était bénie par le curé lors des processions en honneur de ce Saint. Voir là dessus l'ouvrage de mon grand oncle Joseph sur les coutumes de Beaumont en usage jusqu'au XIXe siècle.
    Jacques (pageix)

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  4. Deux dernières remarques (les dernières pour ce soir je le jure!):
    -Les Tartarat (j'en ai plusieurs dans mon ascendance directe) étaient bien présents à Beaumont. Le nom de Tartarat apparaît d'ailleurs sur la façade d'une belle maison rue Nationale (ex Grande rue Neuve des Fossés): "GEORGE(S) TARTARAT FI(L)S A ETI(EN)NE 1779.
    -Je pense que ce méfait a dû grandement mécontenter ledit Goughon, riverain de la "nouvelle carrière " ouverte par nos six lascars. Il est vrai que l'on se trouve sur la crête laissée par la coulée volcanique de Gravenoire, riche en matériaux exploitables...
    Jacques (pageix)

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    1. Oui, Jacques, les Tartarat sont bien de Beaumont. D'ailleurs, mon sosa 2700 est un Tartarat de Beaumont !
      J'ai noté que des Tartarat, de Beaumont, se marient et/ou s'installent à Aubière dès le 17 ème siècle pour faire souche.
      Mais les nôtres n'ont malheureusement pas laisser de traces sur les murs des maisons aubiéroises...
      Je note aussi qu'à Beaumont, comme à Aubière, la rue Nationale s'est "installée" le long des fossés.

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  5. Merci, jacques, pour toutes ces précisions ! C'est vraiment toujours un plaisir de te lire !

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